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Michael Jackson- Black Or White

Black Or White est le premier single de l’album Dangerous ( 11 Novembre 1991). Bien que la majorité des titres de l’album soient imprégnés de rythmes et de sonorités de New jack Swing, Michael Jackson propose d’abord ce titre Pop-Rock-Rap. On peut donc le considérer comme une transition entre les deux univers. Le clip sera réalisé par John Landis qui avait déjà contribué au succès Thriller.

C’est MJJ qui écrit et compose la chanson, avec la participation de Bill Bottrel aussi connu sous les initiale L.T.B pour le couplet de rap. Le titre aborde des thèmes tels que la confrontation avec l’altérité et la mixité sociale. Dans le clip, le roi de la pop semble posséder un don d’ubiquité qu’il utilise pour intégrer et célébrer ce qu’il y a de plus beau chez lui et dans d’autres cultures.

La chanson sera n°1 au Billboard 100 pendant 6 semaines. Mais aussi, n°1 du UK Single Chart, du Swiss Singlees Chart et du Top 50. C’est son meilleur single depuis Beat It.

Le parallèle ne s’arrête pas la. Même si les fans de l’artiste et de Hard Rock se délecte de la prestation de Slash de Gun Of Roses. Le magazine Rolling Stones affirmera dans sa critique de l’album que le guitariste n’atteint pas la Catharsis du solo de Eddy Van Alen sur Beat It.

Michael Jackson s’entoure de ses valeurs sûres

Comme évoqué précédemment, c’est John Landis entré dans la postérité grâce au succès de Animal House et Blue Brother qui réalise le court métrage de 11 minutes estimé à 4 millions de dollars. Cet autodidacte a su imposé son style oscillant entre horreur et parodie à Hollywood. Cependant les années 90 sont assez difficiles pour lui. Ses projets ne séduisent plus le public ( L’embrouille est dans le sac, Le Flic de Berverly 3). Il ne renouera plus vraiment avec le succès. Black Or White sonne donc comme un chant du cygne ou il réaffirmera son habileté en tant que réalisateur et son avant-gardisme sur l’utilisation des effets spéciaux.

Lire aussi : Mark Ryden et sa pochette de l’album Dangerous

Les scènes de danse sont co-chorégraphiés par Michael Jackson et Vincent Paterson. L’artiste et le chorégraphe se connaissent bien. À l’époque où il était assistant chorégraphe de Michael Peters, Patterson apparait dans deux clips de MJJ. Thriller, ou il incarne un zombie et Beat It, ou il tient le rôle de l’imperturbable chef de gang au cure dent.

C’est pendant la conception du clip Smooth Criminal que le roi de la pop recontacte le chorégraphe avec qui il travaillera sur de nombreux projets. À la sortie de Black or White, les deux hommes ont déjà collaborés sur les clips Smooth Criminal, The Way You Make Me Feel et le Bad Tour. Vincent Paterson a un CV très étoffé, il a travaillé dans presque tous les secteurs de l’industrie du divertissement. Notamment le cinéma, la télévision, la publicité et les clips mais aussi le théâtre, l’opéra et Brodway. Mais aussi avec les plus grands comme Madonna, Björk et beaucoup d’autres.

Un clip conçu comme un évènement culturel majeur

Dans la première partie du clip, le spectateur occidental blanc est extrait de son isolement suburbain et revient symboliquement en Afrique, berceau de la civilisation. Porté en dehors de sa centralité, il est l’observateur de l’expression de la richesse et de la beauté de nombreuses peuples. Cela grâce à une large gamme de références culturelles ( lieux, vêtements stéréotypés) ainsi que la danse.

On se souvient tous du prologue qui débute dans une maison de banlieue typique américaine au sein d’une famille interprétée par trois stars. Georges Wendt ( le père) propulsé en Afrique par Macaulay Culkin ( le fils), sous le regard avisé de sa femme ( Tess Harper).

Après avoir traversé le globe tels Elliot accompagné par ET, Georges Wendt confortablement installé dans son fauteuil semble surpris par la scène qui se déroule sous ses yeux. Mais c’est aussi le cas de certains spectateurs. Michael Jackson apparait les mains levées vers le ciel au centre d’une tribu Zoulu. Mais sa peau semble encore plus claire. Depuis le début des années 80 l’artiste apparait de plus en plus blanc. Ce changement d’apparence radical mais lent contribue à sa légende tout en alimentant incompréhension et colère.

Michael Jackson, ici et partout porteur d’une culture hybride

Après avoir découvert la nouvelle apparence de MJ, nous le suivons transcender les frontières et revendiquer son appartenance à tous les peuples sans hiérarchie. Il propose un modèle totalement inversé, censé être harmonieux et à l’inverse de la patriarchie américaine traditionnelle. Les plans son volontairement bidimensionnels avec un aspect dioramique et un effet de diaporama qui renforce le passage aisé d’une culture à une autre et le statut hybride et métissée de l’artiste. On le suit d’abord avec les Zoulou, en Thailande, Sri-Lanka ou encore en Russie.

black or white dance sri lanka

Il y a un petit intermède avec le couplet de rap de Bill Botrell mimé par Michael Jackson, Macaulay Culkin, les membres du groupe Another Creation et Wade Robson, qui travaillera avec Michael Jackson sur deux autres clip ( Heal The World, Jam). Il deviendra danseur et chorégraphe avec sa propre émission The Wade Robson Project. Enfin en 2013 il sera l’un des deux protagoniste du documentaire Leaving Nerverland, période durant laquelle il déposera plainte contre les héritiers de l’artiste.

Les dernières minutes de la première partie du clip prône définitivement l’unité. On retrouve un Michael Jackson triomphant au sommet d’une reproduction de la statue de la liberté. L’emblématique mère des exilés et un fort symbole de multiculturalité. Au fur et à mesure que la caméra s’éloigne du monument nous apercevront un monde utopique sans frontière. Derrière l’artiste, on remarque de nombreux monuments architecturaux tels que le Sphinx, le Taj Mahal, l’Acropole, le Golden Gate ou encore la Tour Eiffel.

La fameuse séquence du morphing

La première partie du clip se termine avec une séquence de morphing. La technique est encore très peu utilisée à l’époque –on la retrouve sur Terminator Le Jugement Dernier quelques mois avant-. Ce fut donc une véritable petite révolution en terme d’effets spéciaux. On voit des personnes d’origines différentes qui incarnent tous les canons de beauté possibles se métamorphosés avec amusement de l’un à l’autre comme si ils ne faisaient qu’un. Cela en répétant (its black its’ white..) avec l’idée que finalement l’un ou l’autre importe peu.

Michael Jackson et le message de Panther Coda

La séquence du morphing est magnifique. C’est un appel optimiste à l’harmonie et l’entente intercommunautaire. Elle s’ancre parfaitement dans la tradition des protestations noires classiques qui vise à interpeller, séduire et éduquer le public blanc. Cette proposition d’un monde inclusif clôturé par une foison de visage heureux d’une communauté à l’autre était parfait. Seulement l’artiste avait autre chose à exprimer.

L’injustice raciale lié au cas Rodney King

Quelques mois plus tôt, le 3 Mars 1991 Rodney King est pris en chasse par des policiers à cause d’un excès de vitesse. Suite à son refus d’obtempérer il sera frappé à de nombreuses reprises par les officiers de police. Cette vidéo de passage à tabac est le premier contenu viral et aura un énorme impact social et culturel. C’est la première fois que l’injustice raciale est clairement exposée aux yeux de tous. L’afro-américain aura reçu au moins 56 coups des policiers. Tous les agents seront acquittés, se qui conduira plus tard aux émeutes raciales de Los Angeles.

Danse Panther Coda, Michael Jackson : masculinité et identité

La séquence Panther Coda débute à la fin du clip officiel. Le réalisateur John Landis dit coupez ! passe devant la caméra qui s’éloigne. Hormis la figurante mise en scène, on constate que toute l’équipe de tournage est blanche. La mise à distance de la caméra semble être effectuée pour révéler cet artifice. Elle permet aussi de revenir dans un contexte beaucoup plus réel. L’objectif finit par se poser sur un panthère noire dont la présence sur le lieu de tournage aurait tout pour inquiéter.

Le felin s’évade vers un extérieur qui dans la symbolique représente le Los Angeles de South Central et de la ségrégation. Pour extrapoler on peut considérer que cela représente aussi l’aliénation et la marginalisation subit par l’artiste et ses frères en tant qu’artistes noirs dans l’industrie du divertissement majoritairement orientée vers un public blanc. Michael Jackson ne danse pas pour séduire mais pour interpeler, choquer. Il se réapproprie la performance scénique de Gene Kelly (Singin’ in the Rain) mais en inverse aussi les codes. L’artiste répète certains mouvement qui confère à sa performance un aspect sexuellement explicite d’autant qu’il finit par refermer sa braguette. Cette danse est brutale, sèche, il brise des vitres et porte des coups de pieds violents dans les flaques d’eau. Par ses hurlement l’artiste semble aussi invectiver d’éventuels agresseurs.

Lorsque son regard croise un projecteur isolé il se tourne vers la caméra et brise le 4ème mur. Ce qui nous rappelle qu’il est toujours dans une performance scénique. Finalement il redevient panthère. Beaucoup ce sont interrogés sur le but de cette scène. Nous pouvons élaborer certaines pistes. Derrières l’idéal utopique de la première partie on s’ancre davantage dans une vision terre à terre qui relève du militantisme. Ses provocation sexuels peuvent faire écho aux craintes de certains blancs fondés sur une virilité réelle ou fantasmée des noirs. Enfin on peut voir que l’artiste se déchaine et laisse s’exprimer sa masculinité et son identité afro-américaine.

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